Chemin de la Guérite: d’où vient le nom?

Je ne m’étais jamais posé la question de savoir pourquoi le chemin à la frontière des 31ème, 32ème et 36ème divisions portait ce nom: pour moi l’affaire était entendue car près de la porte de la Réunion – qui se trouve à une centaine de mètres – il y a effectivement une guérite, petit bâtiment destiné à abriter un garde en faction.

Père-Lachaise Guérite

Le chemin de la Guérite est figuré en rouge, de même que les divisions mentionnées dans l’article. Source: https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=52006523

Seulement voilà, en parcourant les Registres Journaliers des inhumations, je me suis rendue compte que la zone correspondant aujourd’hui à la 33ème et 34ème divisions s’appelait secteur de la Guérite bien avant l’ouverture de la porte de la Réunion…

Ce secteur marquait la limite sud-est du cimetière d’origine et est facilement repérable sur les cartes anciennes puisqu’il accueille en son centre un mamelon de terre qui ferait presque penser à un petit tumulus ou aux vestiges d’une minuscule motte féodale.

Père-Lachaise guérite

Extrait de plan dit de Giraldon-Bovinet (1824)

Père-Lachaise Guérite

Si vous êtes déjà allé rendre visite à Éléonore Duplay (D34), vous avez dû descendre quelques marches qui vous ont justement permis de redescendre de l’autre côté du mamelon, dans un recoin ombragé un peu isolé du reste du cimetière. La tombe des Duplay se trouve à l’angle des deux murs figurés sur le plan: le mur est (en haut sur la carte) est incorporé au cimetière lors de l’extension du cimetière de 1850. Il sépare encore la D34 et la D76.

En consultant un plan moderne du cimetière, on note que le chemin de la Guérite ne borde plus ce secteur puisqu’à la fin du XIXème siècle, l’avenue Circulaire est prolongée vers l’ouest et absorbe une partie du dit chemin dont elle suit fidèlement le tracé.

Cependant, tout cela ne nous dit pas d’où vient le nom du secteur et, partant, du chemin… Encore une fois, c’est en se plongeant dans les RJ que l’on découvre la réponse, notée à la plume par un préposé méticuleux.

La guérite était le surnom donné par les employés du cimetière au monument construit sur la tombe du député François Alexandre Ragon-Desfrins dit Ragon-Gillet (1765-1814), inhumé au sommet du mamelon le 25 juin 1814. La tombe est toujours là mais elle est réduite à un simple socle sur lequel on peut encore lire quelques mots de l’épitaphe d’origine:

A la mémoire

de François Alexandre Ragon-Gillet,

Membre de la chambre

des députés, pour le

département de l’Yonne,

né à Villiers-Saint-Benoît,

le 31 juillet 1765,

mort à Paris,

le 23 juin 1814.

Père-Lachaise guériteHeureusement, Le Champ du repos, ou le Cimetière Mont-Louis, dit du Père Delachaise, par MM. Roger père et fils publié en 1816 nous offre une illustration de la tombe telle qu’elle se présentait à l’origine et qui permet de mieux comprendre le surnom du monument: le socle, autrefois orné d’un buste, était protégé par une édicule faisant effectivement penser à une guérite.

Père-Lachaise Guérite

La flèche indique l’emplacement de la tombe de Ragon-Gillet. Au premier plan, les pavés sont ceux de l’avenue Circulaire: il n’y a plus de trace du dénivelé.

Comme pour le chemin du Coq, c’est donc un monument qui a donné son nom à un secteur, puis à une allée du cimetière. Quant aux chemins du Bastillon et de la Cave, évoqués dans l’article consacré à Léonard, leur nom est un mystère que j’espère pourvoir éclaircir un jour.

 

 

 

 

 

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